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Le G7 ne peut se permettre d'ignorer l'Afrique

LUSAKA – Depuis deux ans que le Premier ministre de la Barbade, Mia Amor Mottley, et moi-même avons exhorté les pays du G7 et du G20 à mettre en place un système financier mondial plus équitable et plus efficace, des progrès significatifs ont été accomplis. Les pays riches ont commencé à réorienter les droits de tirage spéciaux (DTS, l'actif de réserve du Fonds monétaire international) vers les pays dans le besoin, tandis que les banques multilatérales de développement (BMD) ont commencé à mettre en œuvre des réformes.

En outre, une attention particulière a été accordée à l'atténuation des effets du changement climatique. La Banque mondiale a introduit des « clauses de pause » dans les nouveaux accords de prêt afin que les pays frappés par des catastrophes naturelles ou des désastres similaires n'aient pas à s'acquitter du service de la dette. Lors de la conférence des Nations unies sur le changement climatique qui s'est tenue l'année dernière à Dubaï (COP28), les décideurs politiques internationaux ont lancé le tout premier Fonds pour les pertes et dommages, afin d'aider les pays en développement à faire face aux effets du réchauffement climatique.

Mais lorsque les dirigeants du G7 se réuniront dans les Pouilles, en Italie, du 13 au 15 juin, ils devront prendre la résolution de faire davantage pour construire un avenir résilient, équitable et durable. La crise climatique s'accélère plus rapidement que prévu. Mon pays, la Zambie, est actuellement aux prises avec des conditions de sécheresse dévastatrices, exacerbées par le retour d'El Niño - un phénomène météorologique qui peut avoir des effets dramatiques à l'échelle mondiale. Le secteur agricole, qui constitue l'épine dorsale de l'économie et fait vivre des millions de Zambiens, a été particulièrement touché. Les rendements agricoles ont chuté, les réserves d'eau ont diminué et les prix des denrées alimentaires ont grimpé en flèche, entraînant une forte augmentation de la malnutrition.

Malgré l'importance croissante d'autres forums internationaux, dans un contexte de tensions géopolitiques, le G7 a toujours le pouvoir – et la responsabilité – de prendre la tête de la lutte contre le changement climatique, la faim dans le monde et l'extrême pauvreté. Mais pour jouer le rôle qui lui revient, les pays membres doivent prendre des mesures décisives lors du prochain sommet.

Pour avoir le plus grand impact possible, le G7 devrait d'abord se concentrer sur la reconstitution des ressources de l’Association internationale de développement (IDA), le fonds de la Banque mondiale pour les pays à faible revenu et une source d'aide très efficace. Le 21e cycle de financement de l'IDA (IDA21) offre l'occasion de relever certains des défis les plus pressants, car il fournira une bouée de sauvetage à ceux qui subissent de plein fouet la crise climatique et qui sont confrontés à l'insécurité alimentaire.

Étant donné que les pays du G7 représentent environ les deux tiers des contributions des donateurs à l'IDA, ils sont dans une position unique pour veiller à ce que l'IDA21 soit entièrement financé. Dans l’idéal, il faudrait atteindre l'objectif ambitieux de 120 milliards de dollars fixé par 19 chefs d'État africainspour reconstituer les ressources de l’IDA. Mais pour ce faire, le G7 doit inverser la tendance à la baisse des contributions des donateurs, qui n'ont cessé de diminuer depuis le sommet atteint en 2012, et s'engager à une augmentation d'au moins 25 % en termes réels par rapport au cycle de financement précédent.

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En plus d'augmenter le financement d'IDA21, le G7 devrait tirer parti d'un nouveau mécanisme qui pourrait mettre à profit ses DTS inutilisés. Près de trois ans après l'allocation historique de 650 milliards de dollars de DTS, le FMI a approuvé leur utilisation pour des instruments à capital hybride. Cette approche innovante permet aux pays de canaliser leurs DTS par l'intermédiaire de banques multilatérales de développement régionales, qui peuvent alors faire levier sur ces fonds et mobiliser ainsi des financements quatre fois plus importants. Ces sommes sont indispensables aux transitions vertes et à la réforme agricole des pays en développement.

Le G7 doit peser de tout son poids en faveur du système à capital hybride et soutenir la Banque africaine de développement (BAD), l'un des premiers bénéficiaires de l'initiative. Ouvrir la voie à des investissements efficaces et transformateurs dans les pays africains - y compris la Zambie - nécessite également une reconstitution réussie du Fonds de développement pour l'Afrique de la BAD.

Enfin, à l'heure où les pays en développement sont confrontés à des niveaux d'endettement croissants, il est essentiel d'étendre l'utilisation des clauses de pause, qui offrent un mécanisme neutre, en termes de coûts pour les créanciers, tout en apportant un soulagement significatif aux pays en crise. En décembre, la Banque mondiale, sous la direction Ajay Banga, a intégré ces clauses dans les accords de prêt existants pour 45 petites îles et États, et pas seulement dans les nouveaux prêts. Le G7 doit poursuivre sur cette lancée en insistant pour que des clauses de pause soient intégrées dans les accords de prêt existants de tous les pays à faible revenu et en plaidant pour un élargissement de l'éventail des chocs qu’elles couvrent. Une mise en œuvre plus large de ces clauses permettrait aux pays de se concentrer, après une catastrophe, sur les efforts de redressement et de reconstruction.

Il s'agit là de premières étapes importantes dans la réforme du système financier mondial, mais le G7 devrait viser des changements à long terme pour soutenir des niveaux d'investissement public beaucoup plus élevés dans les pays africains et les autres pays en développement. En tant que formidable groupement à l'influence considérable, le G7 a la responsabilité d'agir avec audace pour stimuler la prospérité partagée. En reconstituant intégralement l'IDA21, en recyclant leurs DTS et en préconisant des clauses de pause globales, les pays du G7 peuvent contribuer à jeter les bases d'un monde plus vert, plus sain et plus juste pour nous tous.

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