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La démocratie en état de siège aux États-Unis

NEW YORK – Les récentes remises en cause des processus et des institutions démocratiques aux États-Unis ont soulevé des questions politiques et juridiques fondamentales auxquelles toutes les démocraties libérales doivent pouvoir répondre de manière convaincante. À partir de quel moment les dirigeants militaires doivent-ils refuser d’obéir à des ordres présidentiels qu’ils jugent anticonstitutionnels ? À quel moment la police doit-elle assumer une responsabilité pour les effets discriminatoires du racisme ? Pourquoi les journalistes doivent-ils placer la vérité au-dessus d’une neutralité apparente ? Et à quel moment des images ou des mots utilisés délibérément pour nier des faits avérés doivent-ils cesser d’être protégés par les lois ?

Des événements intervenus récemment aux États-Unis peuvent fournir quelques orientations. Les général Mark Milley, le plus haut-gradé du pays, a eu raison de s’excuser pour avoir participé à la marche impérieuse du président Donald Trump à travers Lafayette Square à Washington, DC. Non seulement des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc avaient été utilisés pour évacuer des manifestants pacifiques du square, mais Trump exploitait aussi de toute évidence l’armée comme pion sur l’échiquier politique national.

De même, il y a lieu d'approuver l’utilisation du mot « meurtre » par le chef de la police de Détroit James Craig pour décrire l’interpellation par la police de Minneapolis de George Floyd, un homme noir non armé. Le policier incriminé et ses trois collègues devaient savoir qu’une pression du genou exercée pendant plus de huit minutes sur le cou d’une personne suffit à provoquer l’asphyxie. Dans la mesure où il est raisonnable de penser que cet acte était intentionnel, le meurtre comme chef d’accusation est tout aussi raisonnable (si l’on accepte le principe que les vies noires comptent). 

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