trump saudi arabia crown prince Bandar Algaloud/Saudi Kingdom Council/Handout/Anadolu Agency/Getty Images

Ceux qui nous gouvernent et assassinent

NEW YORK – « N’y aura-t-il personne pour me débarrasser de ce prêtre turbulent ? » s’exaspère Henri II d’Angleterre au moment d’ordonner l’assassinat de l’archevêque de Canterbury, Thomas Becket, en 1170. Au fil des âges, les princes et chefs d’État du monde entier ont été tantôt auteurs, tantôt complices d’assassinats, comme l’étudient en statistiques et en détails le grand sociologue de Harvard Pitirim Sorokin et Walter Lunden, dans leur ouvrage majeur intitulé Power and Morality. Parmi leurs principales conclusions, s’observe dans le comportement des groupes au pouvoir une tendance plus criminelle et plus immorale que dans celui des populations gouvernées.

Le déni plausible constitue un bien précieux pour les dirigeants. Seulement voilà, après le meurtre de Jamal Khashoggi par son propre gouvernement, l’empoisonnement d’anciens espions russes vivant au Royaume-Uni, et les rumeurs selon lesquelles l’ancien patron d’Interpol Meng Hongwei aurait été exécuté en Chine, le voile se lève plus qu’à l’habitude ces derniers temps. À Ryad, Moscou et même Pékin, la classe politique s’affaire pour couvrir ses tendances assassines.

Nul n’a cependant de leçons à donner en la matière. Les présidents américains ont derrière eux une longue histoire meurtrière, ce qui ne perturbe sans doute pas l’actuel occupant de la Maison-Blanche, Donald Trump, dont le prédécesseur favori, Andrew Jackson, fut un imperturbable meurtrier, négrier et épurateur de l’ethnie des Indiens d’Amérique. Pour Harry Truman, le bombardement atomique d’Hiroshima permit d’éviter le coût élevé d’une invasion du Japon. Le second bombardement en revanche, sur Nagasaki, est tout simplement indéfendable, survenu dans un pur effet d’élan bureaucratique : il semblerait que la bombe ait été larguée sans l’ordre explicite de Truman.

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